Sidonie – première page d’une histoire….

Voici la première page d’une histoire que j’aimerais bien écrire plus tard. L’histoire émerge du brouillard 🙂 Je la vois venir. Qu’en pensez-vous?

Sa tête indolente semble ne plus l’assommer comme ces derniers temps. Cela faisait des jours qu’un brouillard l’englobait avec plus d’empressement que la couverture que sa mère avait posée sur elle. Elle avait beaucoup divagué. Cette sensation disparaissait. Celle de chaleur qui l’avait irradié s’était évaporée, laissant place à la douceur habituelle de l’âtre. Elle pouvait enfin rouvrir les yeux et apercevoir le monde tel qu’il était.
Mais alors d’où venait cette sensation d’avoir été réveillé brusquement ? Elle pensait à un bruit sans en être sûre. Son regard circula dans la maison pour voir si quelque chose l’expliquait.
Son père l’avait posée dans une couchette faite de bric et de broc proche du foyer. Le lit familial était plus en retrait. Ses parents voulaient visiblement l’éloigner pour qu’elle ne les rende pas souffrants, ni eux ni son frère ou sa sœur. Cela avait finalement été une bénédiction car elle a pu dormir sans se prendre des coups de coude son frère ni entendre les ronflements de son père, quoique ce détail était sans doute dû à la maladie qui l’avait enfiévrée.
Le foyer était allumé avec la marmite au-dessus. Sa mère faisait vraisemblablement cuire le repas. Sidonie humait l’odeur des navets, choux et autres senteurs agréables. Elle ne se souvenait plus de son dernier souper. Elle savait que sa mère eut dû tout tenter pour la nourrir. Elle avait hâte de reprendre place autour de la table familiale pour une collation dont sa mère avait le secret. Ces quelques jours au lit lui avaient creusé l’appétit.
Il n’y avait personne d’autre qu’elle dans la pièce. L’armoire était fermée comme à l’accoutumée. À côté, la porte était légèrement entrebâillée et laissait passer l’air du printemps, des animaux qui batifolaient dans la cour et le bruit d’une conversation qui semblait houleuse.
Alors Sidonie tendit l’oreille. Qui parlait ? Il y avait une voie inconnue. Celle de sa mère aussi ? Qui était là ? Son corps se tournait vers l’extérieur. La curiosité la leva. Pour une raison mystérieuse, elle tenta d’être silencieuse. Elle empestait la peur après la fièvre.
La peur dans la voix suppliante de sa mère l’interpella. Elle avait déjà entendu sa mère implorer. Notamment le propriétaire des terres. Mais pas avec cette terreur dans la voie. Non. C’était nouveau. Les poils de Sidonie se hérissaient à cette voix familière et étrange à la fois.
Où était son père ? Et ses frères et sœurs ? Elle voulut regarder ce qui se passait dehors. Mais son corps le lui interdisait.
Elle entendit un bruit sourd. Un cheval hennit de terreur. Un bruit de fusil retentit. Sidonie se figea d’horreur. Sa mère venait de hurler « Noooonn ! ». Puis le nom de son mari. Sidonie appréhenda en un éclair. Son cœur s’arrêta net. Elle n’avait pas besoin de voir pour comprendre. Les coups de fusil pleuvaient comme des grêlons. Elle ne les compta pas. Elle fut choquée lorsque la porte s’ouvrit promptement. Son frère s’étala sur le pas de celle-ci, un trou dans le dos. Il semblait la supplier de l’aider ou de fuir. L’horreur et la peur se lisaient dans ce regard qui s’éteint.
Elle sera la prochaine. Elle doit se cacher. Maintenant.