Le cap

Il y a de la désespérance
Dans ce regard que l’on croise
Comme une brèche sur l’enfance…
Lorsqu’on voit un adulte qui le toise.

Il y a de l’indifférence
Dans ce sourire mécanique
Qui, vide de tous ces sens,
Répond à ses pleurs tragiques.

Il y a de l’abattement
Sur le vide qui nous entoure
Lorsque l’être si aimant
Est parti pour plus qu’un tour.

Il y a des âmes
Lourdes à porter
Sans être infame,
Sans être maniéré
Si nous ne traçons pas un chemin…
Le nôtre ou celui de notre destin.
La vie n’est pas un droit qui va de soi.
Et la mort n’est pas une fin en soi.
Il y a de sombres mélancolies
Qui font tanguer le navire
Sous des tempêtes de soucis
Mais en mer, on ne peut fuir.

Il y a des abandons
Qui soulage la conscience
Mais il faut savoir tenir bon
Et tenir le cap sans impatience.

Le plongeon

Fermer les yeux aide.
L’espace se dissout en volute.
Mon corps au vertige cède.
Mon esprit toujours lutte.

Passé la claque dans le dos,
La sensation est très douce,
Mon corps est submergé d’eau
Vers le haut on me pousse.

Pour toi je fais le plongeon,
Vers l’inconnu. Pas du tout !
L’amour comme un bourgeon
S’épanouit. Tu m’aimes. Itou.

Ce n’est pas vers l’inconnu
Que mon âme m’a plongée.
C’est mon âme sœur à nue.
C’est là que je vais m’allonger.

Nait, vit et meurt

L’Amour est parfois fusionnel.
Ça débute par deux âmes qui s’enlacent
Et se nourrissent puis se lassent
A force de s’étouffer quand l’air s’en mêle.

L’amour est parfois charnel,
Il virevolte tel une pulsion sans réflexion
Qui pousse l’autre à l’exclusion.
Il ne faut plus compter sur l’amour fidèle.

Il y a des systèmes d’auto-défense
Qui n’ont pas de sens
Et ne laissent pas indemne
Celui qui les sème.
Il y a des prières
Dites les yeux fermés
Si forts mais on est désarmé
Avec cette cuillère face à la mer.

L’amour c’est parfois douloureux
Lorsque les âmes fondues enfin s’étirent
Chacun dans un sens puis tirent
Puis le temps les sépare pour être heureux.

L’amour c’est parfois la mort
Des rêves que l’on avait patiemment forgés
Et le calice jusqu’à la lie par gorgée
De cette potion brulante qu’en boit à remords.

La fille sans prénom

La fille sans prénom

Je me souviens de ta peau couleur crème
Et de tes cheveux noirs un peu hirsutes.
Tu étais si petite et si calme. La minute
Où je t’ai vu ne fut pas un rêve bohême.

Rien dans ton sommeil paisible ne montrait
Le drame que ta vie était déjà. Tu étais sage
Et tu respirais simplement, une belle image
Pour une vie future où tout reste à créer.

Un jeune père comme moi n’a plus d’armure
Pour affronter une telle réalité inimaginable.
Mes pensées ont hué une mère qu’on accable
Sans savoir les raisons d’un choix sans doute mûr.

J’aurais tant voulu te serrer dans mes bras…
Je me suis senti si incapable devant ton berceau,
Incapable de recoller ta vie déjà en morceaux,
Incapable de pouvoir soulager le mal qui viendra.

Chère petite fille sans prénom,
Je pense à toi
Comme on pense à un enfant perdu,
Je pense à ce prénom
Que j’avais imaginé pour toi
A cette vie ensemble, ton bonheur dû.
Je pense à toi qui attendait une reconnaissance,
Toi qui n’avais pas de prénom à ta naissance.

Cette pensée me hante car j’ai voulu tout tenter,
Te donner en présent une sœur de ma fille aimée,
De te donner une famille qui s’est autoproclamée,
De te donner un avenir que tu pourrais souhaiter.

Mais il y a des lois, il y a d’innombrables procédures,
Il y a des familles aimantes prêtes à être ton foyer
Mais mon cœur regrettera de ne pas avoir essayer
Car tu as bouleversé ma vie de ton destin si dur

Il danse

Peu de lumière pour voir
Mais en faut-il dans ce noir ?
Il n’a pas envie d’être vu,
Pas envie de se voir entouré,
Que ce soit d’amis ou inconnus.
Il a les yeux fermés pour oublier.

Les battements sont en rythme
Mais rien à faire vibrer en ce jour
Où la vie bat à plein alentour
Et l’entoure comme une intime,
Maladroite souvent, mal habile
Dans ses étreintes, un peu fébriles.

Et maintenant il danse
Doucement
Sur une lumière dense
Maintenant.
Le stroboscope cadence
A pas forcé
Son cœur à la fréquence
Du son versé.
Il sourit d’un rictus bizarre,
Se balance
Tout là-haut dans le noir.
Et il danse.

Il n’a plus froid, n’a plus mal
Malgré l’étrange vague à l’âme
Submergeant comme une lame
Du moment. Tout est égal
Depuis qu’il danse lentement,
La chaise tombée maintenant.

Mon enjoliveur

Je n’aime pas particulièrement
Les routes tortueuses, les chemins de traverse.
Je n’ai pas cherché l’égarement
Mais juste une direction simple, éviter les averses.

Aujourd’hui, la route se dégage
Et j’ai le pied sur le champignon sans halluciner,
Cette fois, je n’ai plus la rage
Mais juste le sentiment qu’être heureux m’est inné.

Ces foutus derniers kilomètres
Me paraissent être des miles marins en tempête.
Ces foutus nids de poule traitres
Me gênent. J’ai l’impression d’en être à perpette.

Je n’ai qu’un enjoliveur,
Pas besoin de plus pour avancer,
Je me sens d’humeur driver,
Prêt à tout recommencer,
Sur cette belle autoroute
Qui s’annonce, dernier kilomètre.
J’ai le volant et, sans doute,
Je fonce tel mon propre maitre.

Les panneaux de signalisation
Me donnent la force d’avancer sans me presser.
Les panneaux sans déviation
Me font dévier de la trajectoire de mon passé.

Je n’ai pas envie du péage,
Mais juste de payer le prix de ma liberté,
Je n’ai pas vu le paysage
La route est belle et le bonheur à ma portée.

Encore quelques kilomètres,
Et je vais pouvoir prendre la sortie dix-sept
Encore respirer l’air à la vitre,
Avant que la vie me montre toutes ses facettes.

Joyau de Russie

Tes yeux,
Je ne peux m’empêcher de les admirer,
Mieux,
C’est le centre de mon monde.

Ton sourire,
J’ai tant envie de le dévorer tout entier,
Pire,
Rayonne à des lieues à la ronde.

Ta peau,
Sous mes caresses, c’est doux et chaud,
En un mot,
Résister est un effort inutile.

Ton visage,
Illumine mon esprit et trouve les mots,
Peu sages,
Illustrant mon désir servile.

J’ai trouvé un joyau de Russie,
La pierre angulaire
Qui manquait à ma petite vie.
J’ai trouvé, et j’en suis fier,
L’amour qui manquait à mes nuits,
La sérénité de mon âme.
Tu fais fuir tous mes ennuis,
Les assassinent comme une lame.

Mon amour
N’a d’égal que la plénitude de mes pensées,
Toujours
Torturées avant que tu ne viennes.

Mon esprit
N’attend que tes caresses et tes baisers !
Il est ravi
Et veut que nos corps s’éprennent.

Je retournerai sur la Lune

Il y a des paradis lointains
Qui ne sont que chagrins
Faits de cendres
Comme d’ombres.
Mais ils protègent pourtant,
Ils sont réconfortants.
Je les connais.
J’y suis même né.

Loin des foules hallucinantes,
Loin d’être aimante,
Je me protégeais,
La Lune me lovait.
Mais il arrive un atterrissage,
Il arrive l’amour en mirage
Avec ces cadeaux,
Et enfin les maux…

Je suis arrivé sur Terre
Et depuis je me perds.
Je retournerai sur la Lune
Pour éviter la gravité
Du monde où je perds pieds.
Je retournerai sans rancune
Dans l’ombre de ma coquille
Qui, d’habitude, m’habille.

J’ai la peau exposée au soleil
Qui me brûle sans pareil
Comme un toast,
Les larmes accostent.
J’ai le cœur fait de lambeaux,
Lacéré par un beau couteau,
Le sang rouge vif
Fuit tout ce suif.

À petits feux

Le goût de ce venin est amer,
Les gerçures soufflant la braise
Adoucissent l’ire des chaires,
Le mal se meut avec toute l’aise
De ce moment qui me brûle.

Ma peau s’endurcit un moment
Puis la mue opère, les globules
Amène le feu qui tue lentement
Ma raison, mon cœur, mon âme.
Mon destin est une suite infâme.

Le destin poursuit sa route
Et m’écrase comme une fourmi
Et quoique tout cela m’en coûte,
Je souris comme face à l’oubli
De mes peines qui me font face.

Je souris sans joie, je poursuis
Ma route, ma pauvre carcasse
Avance et oublie que si je suis
Un homme, c’est par malheur
Que j’attends ma dernière heure !