Meurs, amor !

Les derniers soubresauts m’écœurent.
Les dernières phrases tellement mielleuses,
Que j’en vomis des mots de douleurs,
Ont assassiné mes pensées amoureuses.

Je veux arracher ta queue et tes oreilles,
A coup de dents s’il le faut, pourvu que saigne
Ton visage angélique sans nul autre pareil,
Celui de bébé devenu pire qu’une teigne.

Meurs, amor!
Tes jolis yeux, tes belles phrases
Et tes hanches chaloupées,
Je veux les condamner à mort!
Meurs, amor!
Du passé je veux faire table rase,
Même si la sortie est loupée,
Car ce n’est pas mon grand fort!
Meurs, amor!
J’ai trop vu ton visage sourire,
J’ai trop pensé à te le détruire.
Meurs, amor!

Des bouts de toi s’accrochent à moi.
Aucune douche ne pourra les détacher,
Sorte d’ADN qui me meurtrit parfois
Et que je n’arriverai jamais à arracher.

En nos troubles

Largué en pleine tempête,
Je n’oublie pas les peines
Capitales que mon poète
A subi de par ma faute.
Il a plongé dans la Seine
Et la marche était haute.

Je ne brassais pas du vent
Quand j’exprimais l’amour,
Nous deux nus sur le divan,
Qui à l’instant submergeait
Tout en moi. Le souffle court,
Il devenait mon seul sujet.

Mon lit, ce beau radeau
Où nous nous laissions dériver,
M’a présenté ce cadeau
Sur lequel j’ai tellement salivé
Même si, à mon âge,
Pour naviguer en nos troubles,
J’ai pris son dépucelage,
Et je n’en ressens qu’encoubles.

Sans affronter la houle,
Notre bateau disloqué
Sur les vagues qui roulent
Et nous sépare à des lieus.
Mon cœur fait bilboquet
A la pensée de nous deux.

Où en sommes-nous?

Où en sommes-nous
Malgré toutes nos additions ?
Nous sommes au jour où
Je vais atteindre la saturation.
Je suffoque d’avoir plus
Mais sans avoir plus d’excitation.
J’ai l’impression qu’en sus
Je suis à cran, prêt à l’explosion.

Où en sommes-nous
De toutes ces mesquines divisions ?
J’achève de devenir fou.
Toutes nos règles de vie sans cohésion
M’étouffe, m’enivre
Sans que je retrouve ma respiration.
Je sens cette vouivre
M’enlacer le cou jusqu’à ma radiation.

Où en sommes-nous
De ces traitresses multiplications
De secrets bout à bout ?
La coupe est pleine, en ébullition.
Le barrage va céder
Pour lâcher nos remords en fusion.
Nous serons obsédés
Par cet orgueil d’avoir, à la fin, raison.

Où en sommes-nous
De cette lente soustraction
Qui détruit le nous ?
Cette silencieuse déflagration
A emporté tout
Et même plus de notre union.
Je renais surtout
A l’envie d’être moussaillon.

Ton jean contre mon djinn

Mes mains n’exploreront plus
Les méandres de ton torse poilu
Jusqu’à ce que mes tendres baisers
Mouillent tes zones embrasées.

Ma tendre langue ne valsera plus
Dans ta bouche comme une goulue
Qui s’enivre de tes amers saveurs
Jusqu’à en perdre la notion d’heure.

Ton jean
Contre mon djinn.
Ton t-shirt
Contre mon flirt.

Mes yeux ne reflèteront plus
Ton visage et sa beauté joufflue
Qui ont habités mes entrailles
Et m’ont dévoré. Je suis victuaille.

Ton jean
Contre mon djinn.
Ton t-shirt
Contre mon flirt.
Ta délivrance
Contre mes souffrances
Ton départ
Contre ma vie de bâtard.

Un film à deux

Cette histoire n’était pas raccord.
Nous interprétions des personnages
Aussi docilement que ce foutu décor.
Notre jeu de scène n’avait plus d’âge.

Tout a été monté en plan-séquence.
Nous nous sommes aimés puis plongés
Dans un scénario écrit bien à l’avance.
Nous pérorions des mots mensongers.

Triste fin sans studio de carton-pâte
Pour une romance qui, de bout en bout,
A senti l’amour. Tout est dans la boîte.
L’important en soi est de tenir debout.

Tu m’as fait tourner la tête.
Nous avons tourné le film à deux.
Mais l’heure n’est plus à la fête
Quand on passe d’amoureux
A plus rien du tout. La scène
Finale est passée, la lumière
Crue fuse sur les obscènes
Pleurs qui rongent tels des vers.

Désormais tu es un figurant hors-champs
Et je monologue en attendant le générique.
Je prie pour que le clap de fin, en couchant
Les trois lettres, rendra ça moins prosaïque.

36 adieux

Aucune distance ne facilite la tâche.
Le téléphone brûle mes doigts
De peur qu’encore on se fâche
Et que tu me balances ce que je te dois.

Ton visage et cette icone m’appellent
Pour qu’encore une fois je te blesse
Avec le même sermon sempiternel
Où ce que je t’ai fait je le confesse.

J’ai besoin d’entendre encore ta voix
Et croire notre séparation irréelle
Même si j‘en suis coupable. Je vois
Dans les sons ta rancœur qui révèle

Toute la douleur que j’éveille en toi
Car tu m’as aimé sans rien vouloir
Et j’ai cru mais sans avoir la foi.
Je t’ai aimé sans même le savoir,

Sans même te connaitre, involontaire.
Ma vie et la tienne se sont croisées
Et ont tourbillonnées sans en avoir l’air
Mais l’apesanteur tue les doux baisers.

J’ai pleuré de devoir te laisser partir,
Toi qui voulais m’accompagner plus loin.
Je me suis forcé à rompre sans mentir
Car toi et moi prenions différents chemins.

J’ai encore besoin de ta douce voix
Et, si j’osais le confesser, de ton corps
Car sans ton attention je suis aux abois
Même si dans la vie je joue le fort.

Mais renouer voudrait dire retomber
Pour devoir se relever, toujours amoché,
Alors je garde raisons et je laisse tomber
Mon envie de t’appeler pour me reprocher

Encore une fois d’avoir pris la décision.
Voici mes adieux pour la trente-sixième
Fois et la prochaine sera encore sans raison
Sauf peut-être que, malgré moi, je t’aime.

Tomber 7 fois

A chaque fois, j’y laisse un bout d’âme.
Ça me déchire les entrailles avec les dents.
A chaque fois, je vois d’agiter une lame
Qui emporte une part sans précédent.

Aimer donne le sentiment fou de renaître
Tel le Phoenix, comme dans un jour éternel.
Mais quand la nuit revient prendre mon être,
Je voudrais me cacher de ce destin criminel

Qui veut encore une fois me dépecer là.
Je ne veux plus tomber une septième fois
Car je vais y laisser plus que moi cette fois.

Je voudrais ne plus tomber, être le plat
De résistance de cette nature immuable
Qui nous détruit pour se mettre à table.

Le cap

Il y a de la désespérance
Dans ce regard que l’on croise
Comme une brèche sur l’enfance…
Lorsqu’on voit un adulte qui le toise.

Il y a de l’indifférence
Dans ce sourire mécanique
Qui, vide de tous ces sens,
Répond à ses pleurs tragiques.

Il y a de l’abattement
Sur le vide qui nous entoure
Lorsque l’être si aimant
Est parti pour plus qu’un tour.

Il y a des âmes
Lourdes à porter
Sans être infame,
Sans être maniéré
Si nous ne traçons pas un chemin…
Le nôtre ou celui de notre destin.
La vie n’est pas un droit qui va de soi.
Et la mort n’est pas une fin en soi.
Il y a de sombres mélancolies
Qui font tanguer le navire
Sous des tempêtes de soucis
Mais en mer, on ne peut fuir.

Il y a des abandons
Qui soulage la conscience
Mais il faut savoir tenir bon
Et tenir le cap sans impatience.